LA GUERRE DE L’EAU

L’ACCÈS À L’EAU POTABLE

Le 28 juillet 2010, l’accès à l’eau potable a été reconnu comme un droit de l’homme par l’ONU. On estime en effet que 884 millions de personnes n’ont pas accès à une eau potable de qualité, tandis que 2,6 milliards ne disposent pas d’installations sanitaires de base. L’engagement pris par les membres de l’ONU en 2000, dans le cadre des Objectifs du millénaire pour le développement de réduire de moitié d’ici à 2015 la proportion de personnes n’ayant pas accès à l’eau potable et à des installations sanitaires, rappelle que l’eau et surtout l’accès à l’eau est un des défis majeurs du XXIème siècle.

Si les inégalités d’accès à l’eau potable sont fortes entre les pays, elles le sont également au sein d’un même pays entre zone urbaine et rurale, où l’accés à l’eau est plus difficile. Si le manque d’eau dû aux sécheresses prive la population d’eau, c’est surtout les problèmes de financement des infrastructures qui est à la source de ces inégalités. Les institutions internationales et nombre d’organisations non-gouvernementales sont engagées dans des projets d’assainissement et de développement du réseau d’approvisionnement en eau, mais les coûts de ces infrastructures et de leur entretien est un véritable problème, car il apparaît difficile de faire porter ce coût aux populations déjà très pauvres.

En 2009, la Banque Mondiale estimait que 300 milliards de dollars seraient nécessaires pour réaliser cet Objectif du millénaire pour le développement.

L’accès à l’eau potable pose aussi un problème de gestion. Le mode de gestion favorisé est le partenariat public-privé entre le secteur public et les compagnies privées de distribution d’eau. Cependant, ce mode de gestion inquiète les ONG et institutions internationales car les entreprises privées à but lucratif dans le domaine de l’eau enregistrent un chiffre d’affaires important ce qui fait craindre une hausse du prix de l’eau, que les populations ne pourraient pas supporter.

Conséquence sanitaires

L’eau est une ressource inégalement répartie sur Terre mais davantage que le manque d’eau, c’est surtout l’eau sale qui tue. L’eau viciée est la première cause de mortalité dans le monde. En effet, les réseaux d’assainissement sont encore quasi-inexistants dans une large partie du monde. Qui plus est, nombres d’entreprises privées implantées dans les pays du Sud ne respectent pas les normes environnementales et rejettent dans les rivières des produits hautement toxiques, à la source de nombreuses maladies graves.

Un autre problème provient du fait que la majeure partie des réserves en eau est utilisée pour l’industrie et l’ agriculture, une partie minime étant allouée aux foyers. A défaut d’un rééquilibrage de la consommation d’eau, certains pays du Sud sont donc face à un dilemme entre la faim et la soif.

Inégalité de consommation

Les inégalités de consommation d’eau sont frappantes. On estime qu’un citoyen américain consomme en moyenne 600 litres d’eau par jour, un européen 300 litres d’eau par jour alors qu’en Afrique subsaharienne, la consommation moyenne est de moins de 30 litres par jour et de moins de 20 litres pour un habitant d’Haiti. A Kaboul, capitale de l’ Afghanistan, une famille vit en moyenne avec 10 litres d’eau par jour. La capitale ne dispose en effet que d’un seul circuit de distribution d’eau qui ne peut approvisionner que 18% de la population en eau.

Ces différences viennent du fait que dans les pays développés, les infrastructures sont très performantes et que la majeure partie de l’eau dont dispose les ménages est utilisée pour faire fonctionner les douches, W.C, arroser les jardins privatifs, remplir les piscines. On remarque en effet qu’une hausse du niveau de vie s’accompagne d’une hausse de la consommation d’eau.

Une arme politique et militaire 

Les changements de politique, vis-à-vis des ressources en eau, soulignent le fait que l’eau tend à devenir une source de conflit et un instrument de pouvoir. Considérer l’eau comme un bien public mondial illustre la volonté d’empêcher de telles dérives qui sont bien réelles. Plusieurs exemples montrent que l’eau est devenue un élément de la stratégie géopolitique de certains pays.

Certains bassins fluviaux alimentent toute une région en eau (bassin du Nil, du Tigre et de l’Euphrate, du Niger). Considérer l’eau comme un bien public mondial vise à empêcher un pays de prendre le contrôle de tout le bassin en construisant un barrage ou en détournant le fleuve, ce qui laisserait les régions en aval dépendantes des politiques des pays en amont.

De tels projets ont déjà été réalisés avec des conséquences économiques et écologiques désastreuses à l’instar du barrage d’Assouan et de l’assèchement de la mer d’Aral.

Plus récemment, l’accès à l’eau est devenu un enjeu majeur des négociations entre Israël et la Palestine. Le long du Jourdain, des stations de pompage et des conduits sont construits pour irriguer les terres Israéliennes. La Jordanie a construit et a encore projet de construire des barrages le long du Jourdain. Quatre pays sont donc en tension dans le bassin du Jourdain (Israël, les territoires palestiniens occupés, la bande de Gaza et la Jordanie) pour le contrôle des réserves en eau du Jourdain, qui sont surexploitées. Plus encore, l’eau peut devenir une véritable arme militaire, la soif tuant autant que les balles. Lors des conflits armés au Kosovo, les réserves d’eau ont été détruites ou contaminées faisant des ravages parmi la population civile.